Galerie d’Art XXe Siècle vous invite à explorer ces différents courants, à travers des œuvres qui racontent à la fois une époque, une vision et une émotion. Entre héritage et renouveau, figuration et abstraction, notre sélection reflète la richesse et la complexité de l’art du XXe siècle. Nous avons à cœur de rendre hommage à ces figures incontournables, dont la diversité des styles et des origines a profondément marqué l’histoire de l’art moderne.
Galerie d’Art XXe Siècle invites you to explore these different movements through works that simultaneously tell the story of an era, a vision, and an emotion. Between heritage and renewal, figuration and abstraction, our selection reflects the richness and complexity of 20th-century art. We are committed to paying tribute to these key figures, whose diverse styles and backgrounds profoundly marked the history of modern art.
La Première École de Paris, un mouvement artistique majeur du XXe siècle, est née dans l’effervescence créative de la capitale française durant les années 1900 à 1940. Elle regroupe une génération d'artistes de différentes origines, mais qui partagent un désir commun : renouveler l’art figuratif tout en s'inscrivant dans la modernité et en s'inspirant de la richesse culturelle de Paris, la ville alors au cœur de la scène artistique mondiale.
Cette école n'est pas une école au sens strict du terme, mais plutôt un courant qui transcende les frontières des disciplines et des origines, et qui s'exprime à travers la diversité des techniques et des styles. Parmi les artistes qui l'ont incarnée, on trouve des peintres, des sculpteurs, des dessinateurs, des illustrateurs, tous unis par la volonté d'expérimenter et de repousser les limites de l'art traditionnel.
Les premiers représentants de la Première École de Paris sont pour la plupart des artistes venus de l'étranger, attirés par la capitale et son atmosphère d'avant-garde. Ils ont été influencés par les courants artistiques modernes qui secouaient l'Europe, en particulier le cubisme, le fauvisme, le surréalisme, et plus tard, l’expressionnisme. Parmi les figures emblématiques de ce mouvement, on trouve des noms comme Amedeo Modigliani, Chaïm Soutine, Marc Chagall, Sonia Delaunay, Moïse Kisling, et Giorgio de Chirico. Ces artistes, bien que parfois nés dans des pays très différents, ont tous trouvé à Paris un lieu d'émulation et de confrontation d'idées, un terreau fertile pour leur créativité.
Amedeo Modigliani, par exemple, est connu pour ses portraits aux formes longues et stylisées, une interprétation unique du corps humain, tandis que Chaïm Soutine s’illustre par son utilisation tourmentée et expressive de la couleur, qui met en valeur l'intensité émotionnelle de ses sujets. D'autre part, Marc Chagall, un artiste d'origine juive russe, a fusionné des éléments folkloriques et mystiques dans son art, ajoutant une dimension poétique et onirique à ses œuvres.
André Blondel / Shaye Blonder
Les artistes de la Première École de Paris se sont également inspirés des multiples facettes de la culture parisienne. La ville, avec ses cafés, ses cabarets, ses théâtres et ses galeries, est devenue une scène vivante et vibrante, propice à l’émergence d’une nouvelle créativité. Ces artistes ont vécu l’effervescence du Montparnasse, un quartier qui, à l’époque, était un véritable centre névralgique de la vie artistique, un lieu où se croisaient les esprits créatifs, où les discussions enflammées autour de l'art étaient monnaie courante.
Leurs œuvres témoignent d’une diversité d'approches, d’une grande liberté d'expression et d'une recherche constante de nouveaux langages visuels. Ils jouèrent souvent avec la déformation des formes, les couleurs vives, ou encore les thèmes de la souffrance et de la quête identitaire. La Première École de Paris a ainsi ouvert la voie à une nouvelle vision du monde, un monde auquel la subjectivité, l’individualité et la créativité prenaient le pas sur les conventions académiques.
L’impact de la Première École de Paris va bien au-delà de l’époque dans laquelle elle est née. Elle a préparé le terrain pour les avant-gardes des années 1920 et 1930 et a contribué à définir une époque où la peinture était un langage universel, un moyen d’expression profondément humain et intemporel. Si Paris est aujourd'hui encore considérée comme une capitale mondiale de l’art, c'est en grande partie grâce à l’effervescence intellectuelle et artistique de cette période.
En définitive, la Première École de Paris incarne une époque où l’art, dans toute sa diversité et son audace, s’est efforcé de réconcilier la tradition et la modernité, et où Paris, dans toute sa pluralité, est devenue la muse et le foyer des artistes du monde entier. C'est dans cette fusion des influences, cette ouverture aux cultures et cette recherche de l’inédit que réside son plus grand héritage.
Dali
Le groupe surréaliste a émergé dans le contexte des avant-gardes européennes des années 1920, animées par un esprit de révolte. À l'instar du mouvement Dada, auquel certains membres avaient appartenu, ces poètes et artistes rejettent l'arrogance du rationalisme qui a marqué la fin du XIXe siècle et a été bouleversé par les horreurs de la guerre. Cependant, constatant l'incapacité du Dadaïsme à offrir des valeurs positives, les Surréalistes s'en détachent pour proclamer officiellement la naissance de leur mouvement en 1924.
Sous la direction d'André Breton, le Surréalisme prend d'abord une forme littéraire. Son champ d'expérimentation se concentre sur le langage libéré du contrôle, donnant naissance à des techniques comme l'écriture automatique. Cette approche se diffuse rapidement aux arts plastiques, à la photographie et au cinéma, non seulement grâce aux goûts artistiques de Breton, lui-même passionné d'art et collectionneur, mais aussi grâce à l'afflux d'artistes venus de toute l'Europe et des États-Unis pour s'installer à Paris, alors capitale mondiale de l'art.
Les surréalistes appliquent la théorie de la libération du désir en inventant des techniques pour reproduire les mécanismes du rêve. S'inspirant de l'œuvre de Giorgio De Chirico, reconnue comme fondatrice de l'esthétique surréaliste, ils cherchent à réduire l'intervention de la conscience et de la volonté. Des techniques comme le frottage et le collage de Max Ernst, les dessins automatiques d'André Masson, et les rayographes de Man Ray en sont des exemples notables. Peu après, des artistes comme Miró, Magritte et Dalí créent des images oniriques en combinant des éléments disparates.
La première exposition collective surréaliste a lieu à Paris en 1925, et le mouvement se propage rapidement à l'international, atteignant une renommée mondiale avec les expositions de 1936 à Londres et New York, de 1937 à Tokyo, et de 1938 à Paris. Cette notoriété est renforcée par l'émigration de nombreux membres du groupe aux États-Unis pendant la guerre. Le Surréalisme a ainsi profondément influencé l'art américain : la pratique de l'automatisme devient l'une des sources du travail de Jackson Pollock et de l'Action Painting, tandis que l'intérêt des Surréalistes pour l'objet anticipe l'émergence du Pop Art.
L’Art brut, expression forgée par Jean Dubuffet en 1945, désigne un ensemble de productions artistiques réalisées par des personnes étrangères au monde de l’art institutionnel : autodidactes, malades psychiatriques, marginaux ou encore reclus sociaux. Loin des codes académiques, ces œuvres émanent d’une nécessité intérieure, d’un élan brut de création, sans visée commerciale ni culturelle. En France, ce courant a trouvé un terreau particulièrement fertile, tant par ses figures créatrices que par ceux qui l’ont défendu.
Un contexte d’après-guerre propice
C’est dans l’après-guerre que Jean Dubuffet découvre avec fascination les créations d’artistes « hors-normes » : il les collectionne, les documente, et les expose sous le nom d’Art brut, en opposition à l’art culturel. Il s’intéresse notamment aux productions d’hospitalisés psychiatriques, d’ermites, de médiums spirites ou de simples bricoleurs inspirés. Il crée en 1948 la Compagnie de l’Art Brut avec André Breton, Michel Tapié, Charles Ratton et d’autres, et fonde une collection qui voyagera avant de s’installer définitivement à Lausanne.
Parmi les artistes français associés à l’Art brut, on peut citer :
Aloïse Corbaz, ancienne cantatrice internée en hôpital psychiatrique, auteure de grandes compositions colorées et lyriques.
Adolf Wölfli (suisse mais exposé en France), dont les œuvres foisonnantes et complexes ont profondément marqué Dubuffet.
Marguerite Sirvins, Auguste Forestier, Fleury-Joseph Crépin, Jean Perdrizet, créateurs d’un univers personnel et inventif, souvent visionnaire.
En parallèle, des lieux comme La Fabuloserie (à Dicy, fondée par Alain Bourbonnais) et La Collection de l’Art Brut de Lausanne ont contribué à faire connaître ces œuvres en France.
Jean Dubuffet autoportrait
L’héritage en mouvement
Aujourd’hui, l’Art brut conserve une place singulière dans le paysage artistique français. Des musées comme la Halle Saint Pierre à Paris lui consacrent régulièrement des expositions. Des collectionneurs, comme Bruno Decharme, ont joué un rôle clé dans la reconnaissance de ce courant. Le MAMCO à Genève, le LaM à Villeneuve-d’Ascq ou encore la Maison rouge (jusqu'à sa fermeture) ont également exposé de nombreuses œuvres brutistes.
L’Art brut, en France, continue d’interroger la frontière entre art et thérapie, entre création et folie, entre marginalité et universalité. Il incarne une forme d’expression profondément libre, intuitive, débarrassée des enjeux de style ou de marché – un langage intérieur qui parle souvent à l’humanité entière.
La Deuxième École de Paris et la Jeune Peinture sont deux mouvements artistiques qui émergent après la Seconde Guerre mondiale, alors que l'art se trouve à un tournant décisif, à la fois marqué par la quête de renouveau et la volonté de réagir face aux bouleversements sociaux et politiques. Ces deux courants, qui se chevauchent et se nourrissent de diverses influences, témoignent de l’effervescence créative qui secoue la scène artistique parisienne durant les années 1940 et 1950, période charnière dans l’histoire de l’art moderne.
La Deuxième École de Paris naît dans le contexte d’une Europe dévastée par la guerre et cherche à renouveler la peinture figurative en la réinventant. Si la Première École de Paris, qui avait marqué les années 1910-1930, avait été l'incarnation de l’avant-garde avec des artistes comme Modigliani, Chagall ou Soutine, la Deuxième École se distingue par son désir de se réapproprier une figuration débarrassée des dogmes anciens, et, surtout, d’ouvrir une voie aux artistes face à une époque de reconstruction et de réflexion sur les tragédies humaines.
Parmi les figures emblématiques de ce mouvement figurent des artistes comme Balthus, Zoran Mušič, Jean-Paul Riopelle, Bernard Buffet, et André Brasilier. Leur travail, bien que marqué par une esthétique figurative forte, se distingue par une recherche de la simplicité et de l’intensité émotionnelle. En réaction à l’abstraction qui dominait l’avant-garde, ces artistes renouvellent le langage pictural en retrouvant la place de la figure humaine dans un monde moderne. Si la Première École de Paris avait été marquée par une figuration plus libre et expressiviste, la Deuxième École, quant à elle, puise ses sources dans un réinvestissement de la narration figurative et des thèmes plus universels.
Les artistes de la Deuxième École se veulent avant tout des témoins de leur époque, chacun avec son regard unique. Leurs œuvres illustrent des récits personnels, parfois intenses et chargés d’émotions, souvent centrés sur des portraits ou des scènes de la vie quotidienne. L’art de cette école se caractérise par un réalisme en rupture avec l’académisme, où chaque artiste, à sa manière, recontextualise la réalité à travers des couleurs vives, des formes puissantes et un sentiment de distanciation du monde moderne.
André Marchand
En parallèle à la Deuxième École, le mouvement de la Jeune Peinture, né à la fin des années 1940 et affirmé dans les années 1950, représente un groupe d’artistes porteurs d’une vision dynamique, optimiste et radicalement nouvelle de la peinture. Ce mouvement se distingue par sa volonté de renouveler la peinture en revendiquant une modernité figurative face à l'ascension de l'art abstrait.
La Jeune Peinture n’est pas un groupe homogène, mais plutôt un ensemble d’artistes qui se rassemblent autour de principes communs : une vision jeune et novatrice de l'art, une volonté de figuration libre et un désir de fusionner l’art et la vie. Parmi les membres de ce mouvement, on trouve des peintres comme Bernard Buffet, Jean Jansem, Paul Aïzpiri, Eduardo Arroyo, Michel de Gallard, Guy Bardone, Jean-Pierre Alaux, Claude Schürr, André Brasilier, ou encore Jean Commère. Ces artistes ont cherché à imposer une peinture figurative qui reflète leur époque, en s’ouvrant à de nouveaux sujets et en renouvelant les modes d’expression traditionnels.
La Jeune Peinture est aussi marquée par un esprit collectif et d’entraide. Dans le cadre de leur activité, ces artistes cherchent à s’émanciper des conventions en apportant de nouvelles significations aux motifs traditionnels. Ils multiplient les expérimentations, que ce soit dans l’utilisation de la couleur, des matériaux ou des formes. Une attention particulière est portée à la figure humaine, qu’elle soit présentée de manière épurée, distordue ou chargée d’une dimension symbolique forte. Ce mouvement vise avant tout à rapprocher l’art de la vie, en l’ancrant dans les réalités sociales et culturelles de l’époque.
L’un des traits caractéristiques de la Jeune Peinture est la volonté de réintégrer la figuration dans un monde de plus en plus dominé par l’abstraction, mais sans céder à la nostalgie du passé. Les artistes revendiquent une liberté totale dans leur approche de la peinture, cherchant à éviter tout académisme, tout en restant fidèles à l’idée que l’art doit toujours répondre aux préoccupations profondes de l’humanité.
Bernard Buffet par Julie Buffet
Si la Deuxième École de Paris et la Jeune Peinture partagent la même époque, elles incarnent des visions complémentaires de la figuration. Tandis que la Deuxième École de Paris s’inspire des traditions tout en renouvelant la peinture figurative avec une intense charge émotionnelle, la Jeune Peinture adopte une approche plus radicale, cherchant à expérimenter et à bousculer les conventions tout en restant profondément ancrée dans la vie moderne.
Ces deux courants ont non seulement façonné le paysage de la peinture en France dans les années 50 et 60, mais ont également influencé de nombreux artistes à travers le monde, en contribuant à redonner à la figuration une place centrale dans le panorama artistique de l’après-guerre.
Leurs œuvres, parfois d’une grande puissance expressive, continuent de nourrir le débat autour de l’art figuratif et d’enrichir notre compréhension de la peinture dans la seconde moitié du XXe siècle. Ces mouvements ont posé les bases d’une réflexion sur la relation entre art et société, et ont laissé un héritage de recherche formelle et conceptuelle qui résonne encore aujourd’hui.
Hans Hartung par Paolo Monti
L'Abstraction lyrique est un mouvement artistique qui émerge en Europe après la Seconde Guerre mondiale, dans un contexte de profond bouleversement tant social que culturel. Ce mouvement, qui s'inscrit dans l'histoire de l'art abstrait, est profondément marqué par une volonté de renouer avec la subjectivité et l'émotion, dans un monde encore sous le choc des horreurs de la guerre. Plus qu'une simple recherche formelle, l'abstraction lyrique devient un moyen d’expression de l'intime et de l’individualité, par opposition aux langages rigides et géométriques de l'abstraction géométrique qui dominait avant et pendant la guerre.
Les Origines et le contexte
L’abstraction lyrique naît dans l'après-guerre, dans un contexte où l'art cherche à se réinventer pour répondre aux bouleversements de la société moderne. Ce mouvement trouve ses racines dans l’art abstrait qui s’est développé tout au long du XXe siècle, mais contrairement aux formes d'abstraction plus rationnelles et systématiques, l’abstraction lyrique se distingue par sa volonté d’exprimer la subjectivité, les émotions et les sensations individuelles. Ses praticiens sont influencés par l’art informel et par le travail de certains artistes de l'avant-garde, comme Wassily Kandinsky et Paul Klee, dont les œuvres ont ouvert la voie à une abstraction poétique et expressive.
Dans les années 1940-1950, l'art européen est en pleine réévaluation. L’art abstrait devient un moyen d'échapper à l’héritage lourd du réalisme socialiste et des idéologies totalitaires, qui avaient marqué la guerre et la période précédente. Ce renouveau artistique se manifeste par la quête de liberté, de spontanéité et de geste, ce qui donne naissance à des œuvres caractérisées par des compositions fluides et dynamiques, souvent réalisées de manière intuitive, sans souci de la représentation formelle.
Les Artistes et Leur Approche
Les artistes de l'abstraction lyrique cherchent à traduire l’intensité de leurs émotions à travers la couleur et la forme, tout en s'affranchissant des règles classiques de la perspective ou de la composition géométrique. Le mouvement se distingue par son approche gestuelle, ses coups de pinceau larges et spontanés, ses traces de couleur vibrantes et son refus d'une figuration réaliste. L'objectif n'est pas de représenter la réalité telle qu’elle est, mais de capturer l’énergie vitale qui sous-tend la vie elle-même.
Parmi les figures emblématiques de l'abstraction lyrique, on retrouve des artistes tels que Pierre Soulages, Jean-Paul Riopelle, Hans Hartung, Victor Vasarely, Alfred Manessier et Georges Mathieu. Chacun de ces artistes, tout en cultivant une approche personnelle, partage une volonté de libérer la peinture de toute contrainte figurative. Ils utilisent des gestes expressifs, des taches de couleur et des traces, souvent denses et tumultueuses, pour rendre compte des tourments intérieurs et des sensations.
Pierre Soulages
Pierre Soulages, par exemple, développe une technique unique qu’il appelle "noir-lumiore", où il explore la couleur noire, qu’il travaille comme un espace lumineux et dynamique. Jean-Paul Riopelle, quant à lui, se distingue par ses toiles hautement gestuelles, où la couleur est projetée avec une grande énergie, offrant une sensation de mouvement continuel. Georges Mathieu, connu pour ses compositions gestuelles et son style flamboyant, parvient à allier abstraction pure et une forme de lyrisme dramatique, tout en s’inspirant des grands événements historiques de son époque.
Les Principes de l’Abstraction Lyrique
L’abstraction lyrique ne suit pas un style homogène ou uniforme, mais elle se caractérise par plusieurs principes partagés par ses membres :
La Spontanéité et la Liberté : L'artiste crée de manière impulsive, sans esquisse préalable, dans une quête d’expression directe de ses émotions. L’acte créatif est perçu comme un flux ininterrompu, où la main du peintre semble guidée par une force intérieure qui dépasse la simple intention consciente.
L'Emotion Avant Tout : L’abstraction lyrique place l’émotion et le sentiment au centre de l’œuvre. Chaque geste, chaque trace de pinceau ou éclat de couleur est destiné à communiquer une expérience émotionnelle plus qu’une représentation objective du monde.
La Couleur Comme Véhicule : La couleur devient le principal vecteur de cette expression. Les teintes intenses, parfois contrastées, sont utilisées non pas pour représenter la réalité, mais pour traduire des états d’âme, des atmosphères ou des moments de tension.
La Gestualité : Les artistes de l’abstraction lyrique se concentrent sur le geste, le mouvement et la texture. L’empreinte du pinceau, les éclaboussures et les traces deviennent des signes de l’action elle-même, représentant le rapport intime entre l’artiste et sa toile.
Influence et Héritage
L’abstraction lyrique a profondément influencé l’évolution de l’art contemporain, en particulier dans les années 1950 et 1960. Il a servi de tremplin pour d’autres formes d’expression, telles que le gesturalisme et la peinture action qui se développeront dans les années suivantes. Il a également marqué l’émergence d’une nouvelle conception de l’art, où la peinture devient un moyen d'explorer l'intériorité et la condition humaine.
L'abstraction lyrique reste aujourd'hui un pilier de l’histoire de l’art moderne, bien qu’elle soit parfois éclipsée par d’autres mouvements comme l'art minimal ou l’art conceptuel. Elle a cependant conservé une place de choix dans les collections publiques et privées et continue de nourrir l'inspiration de nombreux artistes contemporains.
Conclusion
L’abstraction lyrique d'après-guerre est un mouvement qui représente une rupture radicale avec les formes rigides de l’abstraction géométrique et le retour à une approche plus subjective et intuitive de l’art. À travers ses formes fluides et ses couleurs vibrantes, elle permet à l'artiste de traduire ses émotions et de se libérer des contraintes extérieures, dans un monde où l'expression personnelle et la liberté deviennent des impératifs créatifs. Ainsi, l’abstraction lyrique offre une alternative poignante et intime à une époque en quête de sens et de renouveau.
Roy Lichtenstein
Le Pop Art est un mouvement artistique né au milieu des années 1950 en Grande-Bretagne, sous l’impulsion de figures comme Richard Hamilton et Eduardo Paolozzi. Presque simultanément, à la fin des années 1950, il émerge également aux États-Unis. C’est toutefois au début des années 1960 que le Pop Art américain prend véritablement son essor, porté par des artistes emblématiques tels qu’Andy Warhol, Roy Lichtenstein, Robert Rauschenberg ou Jasper Johns. Cette branche américaine va largement contribuer à la notoriété du mouvement, en l’imposant comme un courant majeur de l’art contemporain.
Le Pop Art s’inscrit dans une volonté de rupture avec les traditions artistiques. Il affirme que les éléments visuels issus de la culture populaire — produits de consommation de masse, publicités, bandes dessinées, télévision — peuvent être élevés au rang d’art, à condition d’être isolés de leur contexte d’origine ou combinés de manière inédite. Le fondement du Pop Art réside moins dans la nature des œuvres que dans l’attitude artistique adoptée.
Ce mouvement est profondément ancré dans la critique — ou du moins l'observation — de la société de consommation. Les artistes américains en particulier mettent en lumière l’influence omniprésente de la culture de masse sur les comportements et les désirs individuels. Le Pop Art s’étend d’ailleurs au-delà des arts plastiques, touchant la mode, l’architecture, le design ou encore le graphisme.
Dès ses débuts, le Pop Art séduit par sa simplicité apparente et son accessibilité. Les artistes emploient des matériaux et des techniques issus directement de l’univers industriel ou commercial — peinture acrylique, sérigraphie, objets manufacturés. Les couleurs sont souvent franches, vives, volontairement éloignées du réalisme. Andy Warhol, figure emblématique du mouvement, transforme des objets du quotidien — comme une bouteille de Coca-Cola ou une boîte de soupe Campbell — en œuvres d’art, brouillant les frontières entre l’ordinaire et l’artistique.
Le Pop Art bouleverse également le rapport traditionnel à l’œuvre d’art en remettant en question son unicité. Warhol, par exemple, reproduit ses créations en série, parfois à grande échelle, remettant en cause la notion d’œuvre unique et précieuse.
Enfin, le mouvement joue un rôle de désacralisation de l’art. Il s’approprie des figures et symboles populaires — de Mickey Mouse à Marilyn Monroe — pour les placer au cœur d’une réflexion artistique ouverte à tous, loin des sujets dits « nobles » réservés à une élite. Certains artistes, comme Jasper Johns, puisent aussi leur inspiration dans l’univers publicitaire, emblème par excellence de la culture de masse.
Définition :
Le terme Pop Art, abréviation de Popular Art (en français, « art populaire »), a été employé pour la première fois en 1955 par le critique d’art britannique Lawrence Alloway. Ce dernier faisait partie de l’Independent Group, un collectif d’intellectuels britanniques qui réfléchissaient au rôle de la technologie et des médias dans la société contemporaine. L'expression aurait été suggérée initialement par John McHale.
Erro
La Figuration narrative est un courant artistique apparu en France au début des années 1960, principalement dans le domaine de la peinture. Elle s’inscrit dans le contexte du retour à la figuration, en réaction contre l’art abstrait dominant, tout en se distinguant des mouvements contemporains comme le Nouveau Réalisme ou le Pop Art, auxquels elle reste néanmoins liée par certaines approches visuelles.
Il convient de ne pas confondre la Figuration narrative avec la narration figurative, qui désigne une forme de récit combinant texte et images.
Fondements
Contrairement à d’autres mouvements artistiques, la Figuration narrative ne s’est pas constituée autour d’un manifeste fondateur. Elle a toutefois été théorisée par le critique d’art Gérald Gassiot-Talabot dans un ouvrage publié en 1965. Ce courant restreint le champ de la nouvelle figuration en définissant comme "narrative" toute œuvre qui met en scène une histoire ou une temporalité à travers une représentation figurée : par la circulation des objets dans l’image, par des séquences successives, ou encore sous forme de polyptyques. Il s’agit, en somme, d’un art qui cherche à réintroduire une dimension critique et politique, souvent engagée contre la société de consommation.
Les sources d’inspiration des artistes de la Figuration narrative sont multiples : bande dessinée, cinéma, photographie, publicité... autant d’éléments issus de l’imaginaire visuel quotidien. Les thèmes abordés s’ancrent généralement dans des scènes de la vie courante ou traitent de revendications sociales et politiques.
La plupart des artistes associés à ce mouvement ont été influencés par les idées gauchistes de Mai 68, et en particulier par la pensée d’Herbert Marcuse, philosophe de l’École de Francfort. Ce dernier soutenait que plus une œuvre est explicitement politique, moins elle est subversive, et que son potentiel de critique sociale réside davantage dans sa forme esthétique. Les artistes comme Eduardo Arroyo (opposant au franquisme réfugié en France), Gérard Fromanger, Erró, Gérard Guyomard, Ivan Messac, Sergio Birga ou Henri Cueco ont revendiqué cette approche.
En opposition au Pop Art américain, jugé trop formel, esthétisant et peu engagé, les artistes de la Figuration narrative ont cherché à proposer une alternative plus critique. Bien qu’ils empruntent parfois des codes visuels similaires (comme les couleurs vives ou les cadrages inspirés de la culture populaire), leur objectif est radicalement différent : provoquer une réflexion sur le réel, la politique, et la société de consommation.
Eduardo Arroyo
Historique
La notion de structure narrative fait son apparition dans les œuvres de certains artistes dès 1962, tels que Peter Klasen, installé à Paris depuis 1959 (avec Douche, 1962), et Hervé Télémaque (avec Le Voyage, 1962), récemment arrivé de New York. Cette même année, Télémaque rencontre Bernard Rancillac, qui participe au Salon de la Jeune Peinture aux côtés de ses camarades Eduardo Arroyo, installé à Paris depuis 1958, Gilles Aillaud, et Antonio Recalcati. Ils se rassemblent sous l'influence d'Henri Cueco, lauréat du prix Malborough en 1956, et partagent un engagement commun de contestation du pouvoir capitaliste, en étant également rejoints par Peter Saul, également venu de New York.
En novembre 1960, les nouveaux réalistes avaient déjà exposé lors du festival d’avant-garde à Paris. Puis, en novembre 1962, la Sydney Janis Gallery de New York a organisé une exposition incluant les premiers travaux collectifs du pop art américain, qui fut théorisé cette même année. En mai et juin 1963, les autorités américaines ont présenté pour la première fois en Europe, à l'American Center de Paris, l'exposition « De A à Z », regroupant 31 artistes de la jeune scène pop art américaine. À cette époque, la galerie Ileana Sonnabend expose également la première série d'œuvres de Roy Lichtenstein, datant de 1961, inspirée de la bande dessinée. La même année, lors de la troisième Biennale de Paris, tenue fin septembre 1963 au musée d'art moderne de la ville de Paris, Eduardo Arroyo se fait connaître en exposant son polyptyque Les Quatre dictateurs, une série de portraits de dictateurs, dont Franco, qui suscite la protestation du gouvernement espagnol.
Si l'expression « figuration narrative » avait été utilisée plus tôt, notamment par Gassiot-Talabot, qui s’en inspirait de l’utilisation de la séquence évolutive par le peintre et cinéaste d'animation Peter Foldès (Lampe électrique et papillon de nuit, 1948), c’est véritablement lors de l’exposition « Mythologies quotidiennes », organisée de juillet à octobre 1964, que la figuration narrative trouve son acte de naissance. Cette exposition, organisée à la demande de Rancillac et Télémaque par Marie-Claude Dane au musée d'art moderne de la ville de Paris (MAMVP), rassemble des artistes tels que Klasen, Arroyo, Recalcati, Jacques Monory, Leonardo Cremonini, Jan Voss et Öyvind Fahlström. Cependant, quelques mois plus tôt, la nouvelle école américaine avait été consacrée à la Biennale de Venise, où Robert Rauschenberg avait remporté le grand prix, ce qui a quelque peu réduit l'impact médiatique de l’exposition au MAMVP.
En octobre 1965, Gassiot-Talabot organise à la galerie Creuze l’exposition « La Figuration narrative dans l'art contemporain », où est présenté le polyptyque Vivre et laisser mourir ou la fin tragique de Marcel Duchamp d’Arroyo, Aillaud et Recalcati, acquis en 2013 par le musée Reina Sofia de Madrid. Cette œuvre devient le manifeste du mouvement. L'année suivante, une nouvelle exposition intitulée « Bande dessinée et figuration narrative » est présentée au musée des arts décoratifs de Paris.
Œuvres collectives
Le mouvement encouragea également la création d’œuvres collectives, notamment sous la forme de polyptyques, un format adopté dès 1963 par des artistes tels qu'Arroyo avec Les Quatre dictateurs et Télémaque avec My Darling Clementine. La première œuvre collective, intitulée Une Passion dans le désert (1965), réalisée par Arroyo, Aillaud et Recalcati, se compose de treize toiles inspirées d'une nouvelle de Balzac. Cette œuvre retrace les amours d'un soldat de Napoléon en Égypte, et chaque artiste avait la liberté d'intervenir sur les toiles des autres. L’objectif était de supprimer la « facture personnelle », perçue comme une manifestation de l'idéologie bourgeoise de l'art, au profit de l'anonymat généré par le travail collectif.
Le polyptyque Vivre et laisser mourir ou la Fin tragique de Marcel Duchamp, qui s'ouvre par une reproduction de son célèbre tableau Nu descendant un escalier, constitue un manifeste des intentions picturales du mouvement. Réalisée par les mêmes artistes avec la collaboration de Gérard Fromanger, Francis Biras et Fabio Rieti, cette œuvre rend hommage à Duchamp tout en critiquant l’art conceptuel qu'il représentait. Ce polyptyque comporte huit toiles qui illustrent l’assassinat symbolique de Duchamp par les trois principaux peintres du groupe, remettant en question l’autonomie de l’art et dénonçant les « falsifications intellectuelles » de la culture bourgeoise. La dernière toile montre les défenseurs américains et européens du pop art et du nouveau réalisme, tels qu'Andy Warhol et Pierre Restany, soutenant le cercueil de Duchamp, recouvert d’un drapeau américain, précédés par Arman, Claes Oldenburg et Martial Raysse, et conduits par Robert Rauschenberg. Cette œuvre, présentée à la galerie Creuze dans le cadre de l’exposition La Figuration narrative dans l’art contemporain, divisa les 68 artistes invités et provoqua une pétition hostile menée par le groupe surréaliste, à laquelle se joignirent Télémaque et Voss.
En 1966, Gerhard Richter, également adepte du retour à la figuration, s’opposa à l’influence de Duchamp avec sa toile Ema, Akt auf einer Treppe (Ema, nu sur un escalier), un manifeste de sa technique du flou, initiée en 1963.
D’autres artistes, tels qu'Henri Cueco, Lucien Fleury, Gilt, Jean-Claude Latil, Michel Parré et Gérard Tisserand, se regroupèrent au sein de la coopérative des Malassis de 1970 à 1977. L'une des œuvres les plus marquantes de ce groupe est Le Grand Méchoui ou Douze ans d’histoire de France (1972, musée des beaux-arts de Dole), composée de 50 toiles satiriques sur l'action du gouvernement, et qui provoqua un scandale lors de son décrochage pendant le vernissage de l’exposition « Expo Pompidou » au Grand Palais.
En 1977, le musée d'art moderne de la ville de Paris présenta l’exposition Mythologies quotidiennes 2, qui poursuivait cette exploration de l’histoire contemporaine et de la critique sociale à travers l’art.
Mai 1968
Certains artistes du mouvement, en particulier ceux réunis au Salon de la Jeune Peinture au début des années 1960, ont adopté un discours militant marqué à l'extrême gauche, donnant à leur art une dimension de transformation sociale. Parmi eux, Rancillac, Arroyo, Aillaud, Fromanger et Cueco ont également pris part à l'Atelier Populaire de l'École des beaux-arts de Paris, qui produisait les célèbres affiches de Mai 68. L'iconique affiche Nous sommes tous des Juifs et des Allemands, représentant Daniel Cohn-Bendit, serait l'œuvre de Rancillac, un artiste qui attira également l'attention de Pierre Bourdieu. Les philosophes Michel Foucault et Gilles Deleuze ont commenté les œuvres de Gérard Fromanger, tandis que Jacques Derrida s’est intéressé à celles de Valerio Adami, Louis Althusser à celles de Leonardo Cremonini, Paul Virilio à celles de Peter Klasen et Jean-François Lyotard à celles de Jacques Monory.
Combas
La Figuration libre est un mouvement artistique qui émerge dans la France des années 1980, animé par une génération de peintres jeunes et audacieux. Ces artistes sont caractérisés par un enthousiasme presque débridé et une attitude désinvolte qui contrastent fortement avec la rigueur intellectuelle des mouvements précédents des années 1970, comme l'art minimal, le conceptuel, ou encore l'Arte Povera. Tandis que ces derniers se concentraient sur des recherches formelles et des réflexions théoriques souvent éloignées des préoccupations quotidiennes, la Figuration libre, elle, se veut plus vivante, directe et spontanée.
Cependant, contrairement aux néo-expressionnistes allemands ou à la Transavangardia italienne, les peintres de la Figuration libre ne se laissent pas envahir par un sentiment de nostalgie pour les périodes passées ou les courants classiques. Ils ne cherchent pas à revenir à un « âge d'or » ou à s'inspirer de traditions anciennes. Au contraire, ils s'engagent pleinement dans l'actualité de leur époque, plongeant dans le monde moderne sans honte ni culpabilité. Leur style est avant tout coloré, énergique, et fréquemment simplifié, avec des formes graphiques puissantes. Celles-ci s'inspirent largement de la bande dessinée, de la science-fiction, des dessins d'enfants, mais aussi de la culture populaire urbaine, notamment des codes visuels des banlieues et de la culture de masse.
Cette démarche artistique s'épanouit dans une exploration joyeuse des sujets et des formes visuelles. Les peintres de la Figuration libre sont moins influencés par le mouvement du graffiti qui triomphe à l'époque aux États-Unis, mais ils ont une prédilection pour ce que l'on pourrait qualifier d'« arts populaires ». Leur travail est imprégné de références à une large gamme d'images et de symboles issus des cultures populaires et des phénomènes de consommation.
Ainsi, chaque artiste de la Figuration libre va développer un univers visuel personnel, nourri par des influences variées :
Di Rosa, par exemple, s'inspire de l'imagerie des monstres et des robots, empruntant aux codes de la science-fiction et aux comics pour créer des compositions vivantes, parfois surréalistes, où l'exubérance des couleurs et des formes crée un contraste frappant avec l'univers minimaliste des années précédentes.
Combas, quant à lui, puise dans l'art brut, une forme d'expression parfois spontanée et autodidacte, mais aussi dans des influences venues d'ailleurs, notamment de l'art et des symboles issus des cultures arabes et africaines. Ses œuvres sont souvent peuplées de personnages grotesques ou de scènes qui puisent dans les mythes populaires et les traditions visuelles exotiques.
Blanchard s'intéresse aux contes et légendes, au cirque et à l'imaginaire collectif qui l’entoure. Son travail fait un clin d'œil à l'univers des récits populaires, mais aussi à l'atmosphère festive et débridée des spectacles de cirque, où les frontières entre réalité et imaginaire sont floues.
Boisrond se distingue par son utilisation de l'imagerie de la publicité et des objets industriels, qu’il transforme en un art visuel dynamique et provocant. L’influence de la société de consommation, des logos et des objets du quotidien, l'amène à questionner les valeurs de la modernité à travers une peinture saturée de couleurs et de signes qui évoquent la société de masse.
François Boirond
La Figuration libre, tout en rejetant les codes rigides des mouvements artistiques précédents, revendique une liberté d’expression radicale. Son rejet des conventions et son penchant pour l'iconographie populaire marquent une rupture, une forme de rébellion contre les idéologies artistiques qui privilégient la pureté formelle. À travers l'exploration de figures fantastiques, l'irruption de l'humour et des représentations décalées, ce mouvement réussit à capturer une époque de changement et de réinvention, une époque où l'art se nourrit de tout ce qui le traverse, sans jugement ni restriction.
En définitive, la Figuration libre s'affirme comme un art vibrant, irrévérencieux et profondément ancré dans la culture populaire, une forme de peinture vivante qui, loin de chercher la perfection formelle, célèbre la liberté, la diversité et l'énergie créatrice sans retenue.
Miss Tic
Le street art, ou art urbain, est un phénomène culturel mondial qui a profondément marqué l’histoire de l’art contemporain. En France, le mouvement a pris une ampleur considérable au cours des dernières décennies, transformant les rues et les espaces publics en véritables galeries à ciel ouvert. Alliant créativité, politique et rébellion, le street art en France est devenu un moyen d’expression puissant, non seulement pour les artistes, mais aussi pour une génération qui cherche à redéfinir les normes et les limites de l’art.
Les Origines du Street Art en France
Bien que le mouvement street art ait des racines qui remontent aux années 1960 aux États-Unis avec des figures emblématiques comme Jean-Michel Basquiat et Keith Haring, c’est dans les années 1980 que le street art commence à émerger de manière plus marquée en France. Le phénomène s’inspire largement du graffiti, qui trouve ses origines dans la culture urbaine new-yorkaise, mais évolue rapidement pour englober une multitude de formes d’expression, telles que le pochoir, les affiches, les installations, les collages et même la sculpture.
L’une des premières vagues de street art en France apparaît à Paris dans les années 1980 avec des artistes comme Blek le Rat, considéré comme l’un des pionniers du pochoir. Il s’inspire des graffitis américains et introduit une forme d’art accessible à tous, en dehors des galeries et des musées. Jef Aérosol, un autre artiste de la scène française, participe également à la révolution du street art avec ses silhouettes iconiques et ses messages poétiques, ouvrant la voie à une créativité plus libre et audacieuse.
À cette époque, les artistes de street art ne cherchent pas nécessairement à obtenir la reconnaissance du monde de l'art traditionnel. Leur démarche est avant tout subversive, une manière de réintroduire l’art dans l’espace public et de redéfinir les frontières entre l’art légitime et l’art clandestin.
L'Expansion et la Diversité des Pratiques
Au fil des années, le street art en France se diversifie et s’étend à de nombreuses villes, dont Paris, Lyon, Marseille, et Toulouse, mais aussi dans des petites communes où les artistes investissent les murs abandonnés, les trains, les métros et les bâtiments. Ce mouvement, qui a d'abord été marqué par des pratiques illégales, comme le tagging et le graff, s’est progressivement institutionnalisé. Les galeries d’art et les musées commencent à s’intéresser à cette forme d’expression en dehors des sentiers battus.
Parallèlement, de nombreux artistes se sont fait connaître par des œuvres monumentales, souvent réalisées sur des façades d’immeubles. Ce type de création, qui inclut des murs peints à grande échelle, a permis au street art de gagner en visibilité et de se rapprocher de l'art public, tout en maintenant un ancrage dans la rue, là où il trouve ses origines.
En France, le street art se caractérise par sa grande diversité. Les techniques varient entre pochoirs, collages, peintures murales, installations et sculptures, les matériaux étant aussi variés que les supports. De nombreux artistes ont enrichi ce champ d’expression, créant des œuvres qui mêlent l’art visuel, la performance et même l’interaction avec le spectateur.
Des Artistes Emblématiques du Street Art Français
L’un des artistes les plus emblématiques du street art français est sans doute Banksy, bien que d’origine britannique, qui a choisi Paris comme toile de fond pour plusieurs de ses œuvres. Banksy a fortement influencé la scène française, et ses créations, qui traitent souvent de thématiques sociales et politiques, ont provoqué une véritable effervescence autour du street art.
Invader par Julie
D’autres artistes, tels que Invader, qui est connu pour ses mosaïques de carrelage inspirées des jeux vidéo des années 1980, ont également marqué la scène française. Zevs, avec ses œuvres où il détourne les logos des grandes marques et dénonce la société de consommation, ou Miss Tic, dont les pochoirs allient féminisme et poésie urbaine, ont eux aussi contribué à faire du street art un véritable phénomène de société en France.
À Paris, le quartier du Marais et le Canal Saint-Martin sont devenus des lieux incontournables où l’on peut admirer des œuvres de street art. Des événements comme le Festival International du Street Art ou des expositions dédiées, comme celles au Musée en Herbe, ont permis de mettre en lumière ces artistes qui ont su réinventer l'art urbain.
Une Expression Politique et Sociale
Le street art en France n’est pas seulement une forme d’art, mais un moyen de prendre position. En effet, de nombreux artistes utilisent la rue pour véhiculer des messages politiques, dénoncer des injustices sociales, ou critiquer le système. Les murs deviennent alors des lieux de contestation et de réflexion, où l’art est accessible à tous, loin des institutions traditionnelles. Cette portée politique a été particulièrement évidente lors des grandes manifestations sociales, comme celles des Gilets jaunes, où les rues ont été investies par des créations dénonçant l’injustice sociale et la répression policière.
Le street art a aussi joué un rôle important dans la réappropriation des espaces publics, transformant des zones dégradées ou abandonnées en lieux de création et de réflexion collective. Les œuvres qui ornent certains quartiers parisiens, comme ceux de Belleville ou Ménilmontant, sont ainsi perçues comme un moyen de revitaliser l’espace urbain tout en donnant une voix à des populations marginalisées.
Une Institutionnalisation Croissante
Au début perçu comme un acte de rébellion et une forme d’art illégal, le street art connaît aujourd'hui une forme de reconnaissance institutionnelle en France. Des musées comme le Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris, le Centre Pompidou ou encore le MACVAL (Musée d'Art Contemporain du Val-de-Marne) accueillent des expositions consacrées au street art, et certains artistes se retrouvent dans les galeries traditionnelles. Le passage de la rue à la galerie est donc une réalité pour certains d’entre eux, bien que la tension entre ces deux mondes reste vivace.
Le street art est désormais un acteur incontournable de l’art contemporain en France. Il incarne une révolution esthétique et politique qui a su s’imposer dans le paysage artistique, tout en restant fidèle à ses racines populaires et contestataires. La rue, ce lieu de liberté par excellence, continue d’être le terrain de jeu privilégié de nombreux artistes qui, par leur créativité, redéfinissent constamment les limites de l’art et de l’espace public.